2009-06-01

Rodin à la Fondation Gianadda



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Organisé par le Musée Rodin, Paris
6 mars - 14 juin 2009
Cette exposition propose un double parcours à travers sculptures et dessins d’Auguste Rodin qui proviennent tous du Musée Rodin de Paris. Sous le titre « Rodin Erotique », cette présentation est axée autour du culte que Rodin voue au nu féminin, et particulièrement au corps sexué de la femme. Si l’on sait que le nu est, pour le sculpteur, l’élément le plus important de son travail en ronde-bosse, la place qu’il occupe dans des milliers de dessins et aquarelles demeure largement méconnue. Un ensemble d’une trentaine de sculptures et de soixante-dix dessins permet d’explorer la question de l’érotisme dans la sculpture de Rodin et de tracer l’évolution des dessins érotiques de l’artiste, depuis les premiers dessins gouachés des années 1890 jusqu’aux grandes feuilles estompées au crayon des années 1910.
Quelques-unes des sculptures les plus célèbres de Rodin, de L’Age d’Airain au Balzac nu en passant par Le Baiser, Jeux de Nymphes, Le Torse d’Adèle, Iris messagère des dieux ou Le Christ et la Madeleine, font partie de cette exposition et invitent à toute une réflexion sur les passages ténus du nu à l’érotisme, de la sensualité à l’obscène, de la transgression à la profanation.
Parallèlement à son œuvre sculpté, Rodin a dessiné, tout au long de sa vie, et nous a laissé à peu près 10'000 œuvres sur papier, parmi lesquelles environ 7'000 sont conservées au musée Rodin de Paris. Si les œuvres sur papier ne peuvent être montrées que très ponctuellement, elles ne constituent pas pour autant une part mineure de l’art de Rodin, qui affirme à la fin de sa vie : « C’est bien simple, mes dessins sont la clef de mon œuvre » (René Benjamin, « les dessins d’Auguste Rodin », Gil Blas, 17 octobre-8 novembre 1910 ).
Depuis la fin des années quatre-vingt, Rodin réalise de manière quasi obsessionnelle et jubilatoire des dessins qui sont autant de variations sur un même thème, celui du corps nu de la femme. Dorénavant, l’artiste dessine presque exclusivement d’après modèle vivant (« Je ne puis travailler qu’avec un modèle vivant », confie-t-il à Dujardin-Baumetz, « la vue des formes humaines m’alimente et me réconforte »). Il a enfin les moyens de faire appel quotidiennement à des modèles qui viennent se dévêtir, l’une après l’autre, ou parfois à deux ou trois, dans son atelier. Il ne les fait pas poser, mais les saisit dans leurs mouvements, leurs attitudes, les plus spontanées et les plus libres, dans une quête constante de vérité. Dessins parmi lesquels on peut distinguer deux types principaux. Dans le premier, l’artiste dessine vivement sur un feuillet, d’une pointe fine de graphite, en quelques minutes et sans quitter son modèle des yeux (« La main va au petit bonheur ; souvent le crayon tombe à vide ; le dessin se trouve décapité ou amputé d’un membre…Le maître ne l’a pas regardé une fois. En moins d’une minute, cet instantané du mouvement est pris… », témoigne Clément-Janin en 1903). Le deuxième type est un dessin repris ou calqué, à partir de l’un de ces « dessins sans voir », de façon à aboutir à un tracé épuré, simplifié, synthétisé, le plus souvent rehaussé d’aquarelle. (« Ce premier jet acquis, Rodin reprend son œuvre, parfois la corrige directement d’un coup de crayon rouge, mais le plus souvent, c’est en la calquant qu’il la rectifie… », continue Clément-Janin. )
Parmi les dessins de Rodin, près d’un millier sont communément considérés comme des des-sins érotiques, dessins que l’artiste n’enfermait pas dans un cabinet privé, mais qu’il cherchait à montrer en regard de ses sculptures, confirmant leur statut de grande œuvre. Les quelques quatre-ving-dix dessins exposés à la Fondation Gianadda font partie de cet ensemble excep-tionnel. L’artiste y révèle le travail intime et fervent auquel il s’est principalement livré au cours des deux dernières décennies de sa vie. Instaurant une connivence, voire une véritable complicité, avec ses modèles, il les amenait à prendre des attitudes inédites, sensuelles, extra-vagantes, à se caresser, à dévoiler les parties les plus secrètes de leurs corps, à s’ouvrir, tou-jours plus largement et de façon parfois acrobatique, pour montrer sans ambiguïté et sans fausse pudeur, leur sexe, leur plaisir, leur attente. Le sexe de la femme, ce siège des forces et des énergies vitales, presque toujours exposé, est situé au premier plan de la feuille. Dessiner le sexe, c’est dessiner ce qu’il y a de plus vrai. Dans ses dessins, d’une audace et d’une liberté extraordinaire, Rodin ne cesse de cerner, au plus près, la vérité des corps.
« La beauté, c’est le caractère et l’expression. Or, il n’y a rien dans la nature qui ait plus de caractère que le corps humain. Il évoque par sa force ou par sa grâce les images les plus variées. Par moments, il ressemble à une fleur : la flexion du torse imite la tige, le sourire des seins, de la tête et l’éclat de la chevelure répondent à l’épanouissement de la corolle. Par moments, il rappelle une souple liane, un arbuste à la cambrure fine et hardie […] D’autres fois, le corps humain courbe en arrière est comme un ressort, comme un bel arc sur lequel Eros ajuste ses flèches invisibles. D’autres fois encore, c’est une urne. Le corps humain, c’est surtout le miroir de l’âme et de là, vient sa plus grande beauté ». (Auguste Rodin, L’Art. Entretiens réunis par Paul Gsell, Paris, Grasset, 1911).
Nadine Lehni.

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